vendredi 12 novembre 2010

La traversée de deux cols

16 au 22 octobre 2010
Les conditions climatiques ne s’améliorent point tandis que nous descendons de Gorak Shep jusqu’à Dzonglha. Après nous être srrêtés à Lobuche pour diner, nous constatons que les nuages sont plus épais et que le vent souffle plus fort. La neige se met de la partie et la visibilité se réduit à quelques mètres devant nous alors que nous traversons une rivière asséchée. Pour l’essentiel, le sentier que nous suivons demeure à niveau tout en coupant le versant de la montagne qu’il nous faut contourner. Nous avons l’impression de marcher dans les nuages. Dzonglha se cache de l’autre côté d’un torrent. Sa traversée se fait grâce à un pont composé de 2 billots simplement déposés de part et d’autre de la rivière et garni de quelques pierres plates placées sur le dessus.
Dzonglha est un simple arrêt pour les touristes constitué uniquement de 2 hôtels dans lesquels aucune chambre n’est vacante. Cette fois, nous devons nous résoudre à dormir dans un dortoir. Étonnamment, nous dormons profondément malgré la présence de 14 autres trekkeurs grippés ou nauséabonds. Audrey appartient au groupe des grippés tandis que PA se classe parmi les nauséabonds.

Il neige toute la nuit. Tous les trekkeurs assis dans la salle commune se posent la même question : « Devons-nous s’aventurer sur le col Cho La ?». Après mûr réflexion, et surtout après vu qu’un groupe nous ouvre le sentier, nous quittons tous à la queue leuleu. Nous sommes à la fin de la queue et jouissons d’un sentier bien battu.

Nous surmontons lentement les rampes étroites de pierres glissantes qui mènent jusqu’au glacier.


Celui-ci est différent des autres traversés précédemment : d’abord sa surface est beaucoup moins étendue ; ensuite, comme il n’est pas couvert de débris, nous marchons directement sur la glace recouverte de neige fraîchement tombée ; enfin, nous passons juste au-dessous de sa source qui plâtre le versant de la montagne à notre gauche. Nous gagnons le col Cho La (5420 m) sur une barrière aiguisée de rocher jaillissant des glaces. De l’autre côté nous attend une autre descente (nous ne les comptons plus) parmi les blocs erratiques et les amas rocheux. Quelques heures de marche nous dirigent sur Tagnag, un modeste hameau reposant là où les parois resserrées de la vallée que nous descendons s’ouvrent soudainement.

Un temps d’arrêt à Tagnag pour prendre un breuvage chaud nous permet de nous redonner l’énergie nécessaire avant de s’aventurer sur le glacier Ngozumpa derrière lequel se cache Gokyo. Ce glacier, le plus étendu de la région, coule de Cho Oyu, la cinquième plus haute montagne du monde. À notre grande surprise, sa traversée se fait avec facilité. Il suffit de suivre le tracé dessiné par les gens des villages avoisinants. Les cartes sont par contre inutiles. Le glacier est encore en mouvement, ses lacs s’agrandissent et ses monticules croulent lors de la fonte, ce qui modifie année après année la piste le parcourant. C’est fascinant!

Le village de Gokyo est peu perceptible de la moraine où nous émergeons. Un nuage nous entoure. Nous nous dirigeons vers les toits de toile pour s’y réfugier pour la nuit. Audrey négocie un prix pour trois nuitées au Namaste Lodge. Nous obtenons une chambre dans la nouvelle section de l’hôtel où les murs des chambres sont fabriqués seulement de contreplaqué, ce qui rend nos nuits très froides. Non seulement la température trouble notre sommeil, un tremblement de terre l’affecte à son tour et tout l’hôtel se met à vibrer lors de notre première nuit. Les secousses sont minimes, mais fréquentes en ce lieu.

Au matin, les nuages s’étant dissipés, nous pouvons admirer le lac Dudh Pokhari par la baie vitrée de la salle à manger bien chauffée. Ayant besoin de repos, nous limitons nos déplacements au minimum. Nous allons nous s’asseoir au bord du lac et lançons des cailloux à la surface de l’eau pour leur faire faire des bonds. Ce lac est sacré pour les hindous et les bouddhistes. Pour les uns il est le bain de Shiva et pour les autres il est la demeure du dieu Serpent. Ne vous inquiétez pas, faire des bonds n’est pas un sacrilège.


Notre deuxième journée, nous la consacrons à l’ascension de Gokyo Ri (5360 m), un observatoire naturel offrant un des plus beaux observatoires de notre périple. Depuis son sommet, nous avons la chance d’observer plusieurs montagnes : Everest, Nupse, Cholatse, Cho Oyu et d’autres. Cette randonnée nous donne faim.


Au retour, comme entrée, nous nous offrons les restes des autres voyageurs à qui l’altitude coupe l’appétit. Nous avons déjà pris l’habitude de terminer les assiettes des autres, ce qui diminue le gaspillage et réduit le coût de notre facture. Par ailleurs, nous nous laissons gâter par nos hôtes qui sont pleins d’attentions à l’égard de leurs clients. La plus formidable d’entre-elles demeure la distribution de petites serviettes chaudes au jasmin pour se laver le visage et les mains avant le repas.

Des amis québécois travaillant pour Hydro-Québec nous assurent un peu de divertissement en soirée. Nous jouons au 500 jusqu’au moment où on nous demande quitter la salle commune pour permettre aux porteurs de se reposer. L’horloge indique 21h00. Nous sommes les seuls couche-tard.

Le lendemain, nous devons contourner le flanc de la montagne Gokyo Ri. Sur son versant opposé, une montée vers Renjo La se déploie devant nous. Des yaks nous font faces et s’approchent de nous sur le sentier. Ils profitent, du même coup, de leur temps de repos pour brouter leur content d’herbe sous un soleil généreux. Un sentier en ligne droite nous conduit vers un plateau entouré de montagnes chapeautées de neige éternelle. Nous bifurquons ensuite vers la droite en suivant un chemin serpentant entre des dalles lisses, ce qui nous mène au dernier passage de plus de 5000 m prévu à notre itinéraire : Renjo La (5345 m). Nous passons sous les drapeaux de prière qui grelottent au vent. Nous descendons de l’autre côté sur un escalier massif recouvert de neige. Les nuages s’entassent devant nous et voilent la vallée vers laquelle nous nous dirigeons. Le demeurant de la journée est une succession de lacs, de ruisseaux, de rivières ainsi que de ponts et de villages.

Notre énergie est à son maximum, alors nous poussons plus loin que prévu, ce qui nous permet de faire deux jours en un. Dix heures après notre départ matinal, nous nous trouvons à 3800 m d’altitude et ressentons les bienfaits d’un air abondant en oxygène.

Le jour suivant nous réjouit. Peu de marche est prévue à notre horaire, un simple deux heures. Avec un emploi du temps aussi léger, nous prenons un chemin alternatif afin d’aller visiter la centrale hydro-électrique de Thame inaugurée en novembre 1994 par des ONGs autrichiennes et maintenant passé sous la direction des Sherpas. Cette centrale, appartenant à la compagnie Bijuli, est d’une puissance de 620 kW et génère du courant pour plusieurs villages : Namche Bazar, Thamo, Thame, Khumjung et Khunde. Pour en apprendre d’avantage sur cette construction et sur les projets futurs, nous discutons avec un administrateur de la compagnie. Il nous informe d’un projet d’agrandissement de la centrale afin de fournir l’énergie nécessaire pendant la saison forte du tourisme.


Nous avons aussi l’opportunité de partager avec d’autres personnes du village de Thamo telle Ang Rita, un guide ayant atteint 6 fois le sommet de l’Everest et Ang Maya, la propriétaire du Maya Lodge, qui est une activiste sociale.

Nous tardons à atteindre Namche Bazar qui se cache derrière d’épais nuages. Le seul indice nous informant de notre arrivée est le martellement des maçons que nous entendons depuis un moment. Pour souligner l’accomplissement de la boucle des trois cols, nous nous accordons de délicieuses barres de chocolat. L’essoufflement que nous ressentions à notre premier passage à Namche est disparu. Il semble que nous nous soyons bien acclimatés aux hautes altitudes.
Nous ne passons qu’une nuit à Namche et avançons rapidement jusqu’à Surkhe. Cela est une longue et agréable marche au travers de tranquilles villages en contrebas des sentiers trop achalandés par les touristes allant attraper leur vol de retour sur Katmandou à partir de Lukla. Nous voici de retour au milieu des collines qui servent de contreforts aux Himalayas.
Nous sommes arrivés de l’ouest et nous allons maintenant vers l’est. La prochaine route desservit par des autobus se trouve à une semaine de marche environ.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire